La Conférence des évêques de France prend acte
La Conférence des évêques de France (CEF) a pris acte avec regret de cette date « imposée » aux catholiques et à toutes les religions du pays. Sa demande de permettre aux fidèles de participer à la messe dès le 11 mai n’a pas été acceptée. « La liberté de culte est un élément constitutif de la vie démocratique » rappelle la CEF dans son communiqué.
Elle encourage les familles à ne pas renoncer aux obsèques religieuses, autorisées tant dans les églises que dans les cimetières, dans la limite de 20 personnes. Mais elle encourage également les fidèles à « se rendre dans les églises pour y prier individuellement ». Face aux situations de précarité sur le terrain, la conférence épiscopale va évaluer comment certaines activités caritatives pourront reprendre de manière plus intense.
Manque de respect envers les croyants, pour Mgr Rougé
Membre du Conseil permanent de la CEF, Mgr Matthieu Rougé considère que « les 3 lignes sèches et lapidaires du Premier ministre à propos des cultes sont inacceptables ». « Il y a un défaut de respect des croyants et de la liberté religieuse qui est incompréhensible » a indiqué l’évêque de Nanterre dans une interview accordée à KTO.
L’Eglise est « solidaire » de l’effort collectif dans la lutte contre la pandémie. Il invite cependant à ne pas entrer dans un esprit de révolte, mais à être « fermes et paisibles » pour exprimer combien les catholiques sont choqués de voir comment la question des cultes est traitée dans cette crise.
Dans les heures qui ont suivi l’annonce du Premier ministre, plusieurs évêques se sont exprimés. « La confiance ne semble pas être accordée aux fidèles et aux prêtres pour faire preuve de prudence et de responsabilité » regrette Mgr Aumônier. L’évêque de Versailles se donne quelques jours pour « faire face avec vigueur et créativité au nouveau contexte » et invite ce que les décisions gouvernementales restent ouvertes à un vrai dialogue.
Après un cri d'alarme lancé la semaine dernière, Mgr Robert Le Gall, archevêque de Toulouse, craint que des célébrations « clandestines » se mettent en place en raison de cette règle drastique qui suscite son indignation. « Si la vie économique est vitale, la nourriture de la foi l'est tout autant » explique l'ancien père abbé bénédictin. « La vie sacramentelle doit repartir elle aussi ! Elle est pour nous vitale, alimentaire ». Mgr Ginoux proteste également contre cette décision. « Evêques, nous ne pouvons admettre que le gouvernement nie notre spécificité de la vie spirituelle de nos fidèles. Aucun gouvernement français ne l’a fait » a écrit l’évêque de Montauban sur Twitter.
L’archevêque de Chambéry a envoyé un mail aux forces vives de l’Eglise en Savoie. Il leur a exprimé son incompréhension devant cette décision. « Pourquoi cette différence de traitement qui s’apparente à une ségrégation injustifiée ? » s’interroge-t-il. « Ne soyons pas étonnés si la tension monte dans les familles croyantes, catholiques ou autres, et surtout du côté des jeunes adultes ! ».
Les contextes diffèrent selon la densité de population, en milieu urbain ou rural, et la présence du virus. Pour la Corrèze, Mgr Bestion, évêque de Tulle, demande que soit pris en compte en lien avec l’autorité préfectorale, « la réalité de chaque diocèse, de telle sorte que le culte puisse reprendre à partir du 17 mai ».
Les forces morales et spirituelles participent au dynamisme d’un pays
Dans un communiqué de presse, l’archevêque de Rouen interroge : Pourquoi les messes ne peuvent-elles pas reprendre « alors que tant d’autres activités reprennent le 11 mai » ? « Pourquoi ne pas avoir fait appel à la responsabilité des fidèles qui cherchent le bien de tous selon l’exigence de l’Evangile ? ». Mgr Dominique Lebrun partage « l’incompréhension de beaucoup devant la relégation de la liberté de culte à la dernière roue du carrosse de la nation française ». C’est oublier que « les forces morales et spirituelles d’un pays participent à son dynamisme, y compris économique ».
L’Eglise et les religions, geste barrière contre les dérives virales de la peur
C’est un tort de retarder la possibilité d’honorer concrètement « la profondeur spirituelle qui est vitale à l’être humain » relève l’archevêque de Marseille. Mgr Jean-Marc Aveline s’est exprimé dans une tribune publiée par son diocèse. Dans l’histoire, les crises économiques ont pu faire le lit d’« idéologies meurtrières qui instrumentalisent la misère des peuples ». « Nous savons d’expérience comment les engrenages mortifères ont l’art de commencer dans la banalité ». Les religions éclairent et mobilisent les consciences. Elles peuvent prendre part à ce combat. Mgr Aveline est prêt à « mobiliser toutes les ressources du diocèse pour reprendre rapidement une vie de prière communautaire et sacramentelle », dans l’esprit des principes énoncés par le Premier Ministre. « Laissez l’Eglise et les religions jouer pleinement leur rôle de geste barrière contre les dérives virales de la peur et du mépris ! » demande-t-il solennellement aux pouvoirs publics.
Après l’assemblée plénière extraordinaire des évêques de France du vendredi 24 avril dernier, une nouvelle rencontre de tous les évêques est prévue en visio-conférence lundi 4 mai à 15h.